Depuis quelques semaines, je m’intéresse à nouveau aux écovillages. D’un côté il y a le projet d’écovillage pour familles mono-parentales qui commence à susciter de l’intérêt, de l’autre côté il y a une conférence que je suis en train de préparer pour Alternatiba Léman au sujet de l’écovillage dispersé: cela fait que j’ai souvent l’occasion de discuter, remettre en question mes idées, en tester des nouvelles…
Et dans cette discussion, je reviens souvent au problème initial: presque 90% des projets échouent, parmi ceux qui restent, très peu arrivent à passer le cap des 10 ans, et en tous cas, le nombre de discussions sur les écovillages dépasse largement le nombre de projets réalisés. Dans les discussions officielles des mouvements qui promeuvent la création des écovillages, la raison invoquée est toujours la même, à savoir le manque d’outils relationnels nécessaires à faire avancer le projet. Dans la pratique c’est plutôt l’envers. J’ai participé à plein de discussions, j’ai suivi plein d’ateliers et expérimenté plein de techniques différentes, mais je n’ai pas remarqué pour autant une corrélation entre la connaissance des outils et le développement des projets: Les gens continuent à se former à l’infini, apprennent tous les outils disponibles, mais ils n’avancent pas sur leurs projets.
Dans un billet précédent, j’avais indiqué deux autres raisons qui rendaient difficile le démarrage d’un projet d’écovillage:
- l’envie de récréer une économie parallèle à partir de zéro
- une vision de la communauté qui va à l’encontre des intérêts de ses membres.
Et j’avais proposé de créer un réseau de petites structures, plus similaire à un village traditionnel ou à un district industriel qu’à un écovillage. Dans ce réseau, chaque structure aurait pu innover sur un ou plusieurs aspects, et partager ses découvertes avec des structures similaires dans la même région. C’est un peu ce qui s’est passé à Romont avec Glâne Ouverte, la Maison Verte, Croqu’terre et les autres organisations locales.
Aujourd’hui, je propose une autre piste.
Pour cela, je reviens à la racine du terme écovillage:
- éco renvoie à la nature et à l’envie d’une vie plus respectueuse de l’environnement
- village renvoie aux communautés rurales et auto-suffisantes, comme on pouvait les trouver à la campagne jusqu’au XIX siècle.
Et là on tombe sur deux faiblesses du concept d’écovillage.
- Les villages ruraux du passé n’étaient pas des communautés intentionnelles, mais plutôt des communautés de personnes désireuses d’améliorer leur qualité de vie en collaborant pour la création d’une société plus complexe. Dans un village traditionnel, les différents habitants ont chacun ses idées et ses objectifs, mais collaborent pour créer une économie d’échelle qui profite à tout le monde. Les échanges entre les membres d’un certain village étaient pour la plupart des échanges commerciaux.
- La motivation principale derrière les écovillages est la volonté de sortir d’une société industrielle qui consomme des ressources, produit des inégalités et pollue la planète. Le problème dans ce cas est que les acteurs potentiels d’un écovillage (des occidentaux qui ont fait des études, ont un bon travail et possèdent une conscience environnementale) sont les principaux bénéficiaires de la société industrielle, tandis que les exclus (les chômeurs, les working poor et les non-occidentaux) n’ont aucune envie de faire des sacrifices supplémentaires pour le bien-être de la planète.
Pour sortir de cette impasse, il faut encore une fois sortir du modèle classique de l’écovillage, pour aller chercher un autre type de communauté intentionnelle: le Monastère.
Le monastère correspond à tout ce que les créateurs d’écovillages désirent: une communauté intentionnelle de gens motivés à vivre en consommant très peu de ressources, en travaillant dur et en renonçant à presque tout.
Pour comprendre la raison du succès des monastères, partons de la devise qui est traditionnellement liée aux monastères: Ora et Labora, et analysons-la en détail:
- Ora (prie) revient à la raison d’être des monastères: la communion des moines avec Dieu. Si les moines sont là, c’est pour vivre pleinement leur communion avec Dieu: c’est leur motivation forte.
- Labora (travaille) revient à tout le travail pratique nécessaire à faire marcher le monastère: produire de la nourriture, construire des objets, s’occuper de toutes les tâches de la vie quotidienne qui rendent le monastère fort et indépendant, et qui permettent aux moines de vivre leur vie en communion avec Dieu à longueur de journée.
Nous avons donc deux points forts qui sont à la base d’une communauté intentionnelle à succès:
- l’envie de vivre une vie en accord avec un principe fort.
- le travail pratique pour créer et faire vivre une communauté construite selon ce principe.
Et si nous réexaminons la motivation écologique derrière les projets d’écovillage, nous pouvons noter qu’elle n’est pas assez forte pour stimuler les gens à s’investir sur un projet. Le monde semble continuer malgré la fin du pétrole, les changements climatiques se manifestent loin de chez nous, et finalement, rester en ville semble une meilleure option que se lancer dans un projet d’écovillage qui pourra, au mieux, garantir un style de vie un peu moins facile que celui qu’on laisse.
On a le Labora, mais pas l’Ora.
Pour chercher la raison d’être qui pourrait pousser à la réalisation d’une communauté intentionnelle, Nous irons examiner deux communautés à succès, les Naturistes et les Burners. Et cela, dans le prochain billet.
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[…] sortira pas seuls. Où nous serons, il nous faudra une communauté: une famille, un village, un monastère. Indépendamment du type de communauté où nous décidrons d’être, il nous faudra des […]
[…] premier cas est celui des monastères: le fait de tout concentrer dans un seul édifice permet aux moines de ne pas mélanger leur style […]
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[…] modèle idéal de l’habitat communautaire reste le monastère. Et donc, nous aurons un modèle […]
[…] religieuses, ou promouvant un certain style de […]
[…] le concept dans des billets précédents donc, je vous renvoie à ce que j’avais expliqué là, là et […]
[…] les deux billets précédents nous avons vu que, pour avoir une communauté intentionnelle qui fonctionne, […]
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