Après notre tour de la banlieue Sud de Bâle, revenons vers le centre ville, et précisément au 192 de la Dornacherstrasse, où une vieille usine désaffectée est devenue un centre de quartier regroupant les activités les plus diverses, le Gundeldinger Feld.
L’histoire du lieu aurait pu être la même de beaucoup d’autres cas similaires: une usine en plein centre-ville qui part en banlieue pour manque d’espace disponible, un vide urbain qui se crée, des intérêts qui commencent à se montrer… Mais c’est à ce point que le choses changent. Les architectes du bureau INSITU, habitants du quartier, entendue la nouvelle du départ de l’usine, décident que avec cet espace on peut faire quelques chose que puisse être utile à tout le quartier. Commence donc une négociation entre les architectes, les anciennes propriétaires et des investisseur potentiels, qui finalement aboutit à la création d’une SA, qui achète les lieux et entreprend sa mutation.
Les architectes du bureau viennent tous d’une période de travail en Afrique, et décident d’appliquer ici les mêmes principes qu’avaient réglé leurs expériences africaines, notamment:
- la recherche d’usages compatibles avec les espaces à réaffecter, de manière à minimiser les travaux nécessaires;
- l’usage de materiaux massifs (notamment bois, métal, maçonnerie, béton), facilement réparables et dotés d’une longue durée de vie.
- l’ouverture des espaces ainsi réalisés à une population la plus vaste possible.
Le résultat de cette approche est un ensemble comprenant les fonctions les plus diverses, notamment:
- deux restaurants, le Eo Ipso et le Blinde Kuh
- une auberge de jeunesse
- une halle de grimpe
- une bibliothèque
- le siège central de Pro Natura
- L’atelier d’architecture INSITU
- une place de jeux couverte pour enfants
- plein d’autres bureaux et atelier…
Vue de la cour centrale. À gauche, le restaurant Eo Ipso, à droite, les bureaux.
Détails de la cour. Les travaux ici se sont limités à un nouveau sol, des pots à fleurs et des abris vélos. Grâce aux règlements bâlois, très permissifs vers les projets « sans voitures », aucune place de parc n’a du être aménagée dans l’enceinte du complexe.
Au contraire d’autres projets similaires, les bacs à fleurs ne sont pas cloués au sol. Les usagers du lieu peuvent les déplacer selon leurs envies, et donner leur touche personnelle à cet espace.
Le restaurant Blinde Kuh et ses bouteilles écrites en Braille. Dans ce restaurant, le personnel est entièrement composé par des aveugles et on mange dans le noir le plus complet. Si vous passez par Bâle, c’est une expérience à ne pas manquer!
une halle avant rénovation.
Une halle similaire, reconvertie en bibliothèque de quartier. On peut noter que beaucoup d’éléments de l’usine (notamment les grues) sont restés sur place.
La halle de grimpe. Même ici, les éléments du passé industriel du complexe restent bien visibles.
Quelles sont les leçons à tirer de ce projet? Moi, je n’ai retenues trois:
- Le développement durable n’est pas fait de matériaux futuribles (on peut à ce propos faire une comparaison avec le « matelas » dont je vous avais parlé quelques jour en arrière) ou de projets hyperdéterminés, mais plutôt de solution simples et facilement reproductibles. (une série de lectures à ce sujet se trouve sur le site « emergent urbanism« )
- Pour être accepté du grand public, un projet issu du développement durable doit être amusant et facile à utiliser: quelqu’un y viendra pour ses qualités environnementales, quelqu’un d’autre pour sa facilité d’usage, des autres encore pour ses prix bas, et tous ensembles contribueront à faire vivre le projet.
- Les locaux doivent être loués à un prix qui soit assez bas pour que des activités indépendantes puissent y accéder, mais assez haut pour que ces activités soient obligés a développer un projet viable