J’entends de plus en plus souvent des réflexions sur la fin du travail (comme dans cet article, entre autres). En gros, avec l’arrivée des robots et de l’intelligence artificielle, le travailleur serait une catégorie en voie d’extinction, un peu comme la machine à écrire ou les cassettes audio.
Machine à écrire et employée. La première est déjà dans le passé, la deuxième aussi? (source image)
Un train-robot à Lausanne. Il travaille 20 heures par jour, ne demande pas d’augmentation de salaire, il ne fait pas la gréve… (source image)
Entre temps, je vois des autres changements à ce sujet:
- une méfiance de plus en plus diffuse vers le marché actuel de l’emploi. Si autrefois les gens étaient prêts à faire l’impossible pour attirer un employeur potentiel et s’assurer une carrière de rêve, maintenant cette promesse ne fait plus rêver: les gens continuent à essayer d’attirer un employeur, mais ils ne sont plus fidèles à l’entreprise, et partent dès que le besoin d’argent se fait moins pressant.
- l’émergence de plateformes comme Blablacar, Uber ou Airbnb, où on peut offrir des services (un trajet en voiture ou une location de maison de courte durée) en échange d’argent, et arrondir ainsi ses fin de mois.
Allons alors examiner les conséquences de ces réflexions.
Le premier concept qui saute aux yeux est que le monde du travail vit un décalage entre la vision de l’entreprise et la vision du travailleur. Prenons par exemple le cas d’une entreprise de travail intérimaire:
- le travailleur prépare son CV et le dépose gratuitement chez l’intérimaire.
- l’entreprise, en payant, accède aux CV déposés chez l’intérimaire, et choisit ceux qui lui intéressent.
dans ce cas:
- du point de vue de l’intérimaire et de l’entreprise, l’entreprise est le client et le travailleur est la marchandise: l’entreprise paie, donc elle doit forcement trouver le profil recherché; le travailleur ne paie pas, donc il peut trouver – ou pas – le poste qu’il recherche.
- du point de vue du travailleur, lui-même est le client: pour rentrer en contact avec l’intérimaire il doit faire une certaine partie de travail bénévole (rédaction d’un CV et d’une lettre de motivation, préparation d’un entretien, alignement avec la philosophie de l’entreprise), en échange duquel il demande la carrière de rêve qu’on lui a promis.
- Ce système tient la route si les promesses de carrière faites au travailleur sont assez intéressantes, et la probabilité de les obtenir assez haute pour le convaincre à faire tout le travail bénévole qui lui est demandé. Dans le cas contraire, tout le système disfonctionne et crée des chômeurs difficilement employables (c’est le cas, par exemple, des séniors bien formés).
En plus, les sites comme Blablacar, Uber ou Airbnb contribuent à changer la donne en défaveur du marché traditionnel de l’emploi: pourquoi doit-on perdre son temps à rédiger un CV et des lettres de motivation, se préparer pour des entretiens, apprendre à se conformer à une culture d’entreprise qu’on n’aime pas trop, quand on peut faire de l’argent plus facilement, en mettant à disposition sa voiture et sa maison?
Le gros changement de Blablacar, Uber ou Airbnb est celui-ci: ces entreprises ne vendent pas des logements à bas prix ou des trajets en voiture.
Elles vendent du travail.
Quand on s’inscrit auprès une de ces entreprises, on fixe soi-même ses heures de travail et ses prétentions de salaire, on est encouragés à être soi-même, et l’entreprise est payée par une commission sur le chiffre d’affaires réalisé par le travailleur.
Donc, on peut élargir ce système à des autres métiers, et créer la figure professionnelle du vendeur de travail. En résumé, un vendeur de travail:
- est mandaté par un client, qui a des compétences professionnelles à valoriser, et qui cherche une alternative au marché du travail traditionnel.
- le client définit lui-même ses disponibilités, et concerte avec le vendeur le salaire qui veut obtenir.
- Le client ne dois plus se conformer à une culture d’entreprise. Bien au contraire, ses particularités sont autant d’atouts pour se démarquer de la concurrence.
- le vendeur s’engage à trouver au client des mandats pour un chiffre d’affaires prédéterminé, et peut aussi proposer un service de portage salarial. En échange, il prend une commission sur les mandats trouvés.
Qu’en pensez-vous de ce modèle? Vos avis sont les bienvenus!




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